Octobre 2017
C’est officiel depuis le mercredi 13 septembre : la candidature de Paris a été retenue pour organiser les Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Christophe Lepetit, responsable des études économiques au Centre de droit et d’économie du sport (CDES) et fin connaisseur du dossier, répond à nos questions.
Quel a été votre sentiment, à l’annonce de l’attribution des Jeux de 2024 à Paris ?
J’ai pensé aux femmes et aux hommes qui ont su tirer les leçons des échecs des candidatures de Paris pour 2008 et 2012 et qui ont réussi à convaincre toutes les parties prenantes de tenter de nouveau l’aventure. Plus personnellement, j’ai envie de croire à ce que propose Paris pour 2024 : des Jeux sobres budgétairement, peu consommateurs en énergie et qui apportent beaucoup aux territoires d'accueil, à leurs habitants et plus largement aux Français dans leur ensemble.
Et qu’est-ce que les JO peuvent apporter aux habitants ?
De l’emploi, des logements, la transition énergétique, la santé par la pratique sportive… En résumé, une nette amélioration de leur qualité de vie. Il faut placer les JO au cœur des enjeux de la société française. L’organisation des Jeux s’accompagne de politiques publiques de développement économique et territorial sur le moyen et le long terme. Dans le cas de la Seine-Saint-Denis, qui accueillera notamment le village olympique, les questions du désenclavement urbain, de développement économique et d’emploi sont en première ligne.
Vous êtes d’ailleurs intervenu sur la thématique de l’emploi lors d’un des ateliers de préparation de Paris 2024, organisé à Est Ensemble en juin…
Oui et les acteurs de l’emploi et de la formation présents ont bien saisi qu’en cas de victoire, il fallait au plus vite former la population active et accompagner les entreprises pour se positionner très tôt, y compris en sous-traitance, sur les marchés publics colossaux à venir. L’emploi local pourrait aussi profiter de critères favorables à l’insertion et aux circuits courts, à condition, encore une fois, de la présence d’entreprises et de main-d’oeuvre adaptées. La course contre la montre a déjà commencé ! L’étude d’impact économique menée par le CDES table sur une création de 119 000 à 247 000 emplois tous types confondus avant, pendant et après les Jeux, dont certains bénéficieront à la population locale. Dans un département comme la Seine-Saint-Denis où le chômage est important, ces emplois peuvent se pérenniser ou servir de première expérience professionnelle et donner accès au marché du travail. Les Jeux créent non seulement une génération de sportifs mais aussi une génération de travailleurs.
Selon votre étude, les emplois créés seront liés soit au tourisme, soit à l’organisation même des Jeux, soit à la construction. Lesquels concerneraient le plus la Seine-Saint-Denis ?
L’organisation et la construction, principalement. Les grands équipements à bâtir pour Paris 2024 se situent d’ailleurs en Seine-Saint-Denis : le village olympique, le centre des médias et le centre nautique. Pour ce qui est du tourisme, il est probable que les visiteurs reviennent en revanche vers Paris.
Le coût de ces Jeux est estimé à 6,8 milliards d’euros. Pensez-vous que Paris évitera les dérapages budgétaires qui ont marqué les éditions précédentes ?
Nous avons analysé le budget de Paris 2024 et, oui, nous pensons qu’il est tenable car il y a moins de zones de risque. Les dérapages arrivent en général quand le projet comporte beaucoup de nouvelles infrastructures à construire, notamment en termes de transport (métro, autoroutes, aéroport), ou quand de grosses opérations de transformation urbaine sont prévues. Or, la grande majorité des équipements du projet parisien existe déjà. C’est aussi une question de crédibilité : la sobriété budgétaire est à la base de la candidature de Paris, qui a donc tout intérêt à la respecter.
Barcelone en 1992 et Londres en 2012 sont souvent citées en exemple. En quoi ces Jeux inspirent ceux de Paris ?
Barcelone et Londres ont su utiliser leurs Jeux comme accélérateurs de développement et ont su en gérer l’héritage, notamment en convertissant les infrastructures olympiques. La candidature de Paris se situe dans cette veine. D’une part, le village olympique, entre Saint-Denis et Saint-Ouen, deviendra un quartier de logements et de bureaux et, d’autre part, de grands chantiers menés en parallèle sont de fait sécurisés par l’obtention des JO. Un exemple : les travaux du Grand Paris Express, dont les lignes devront être mises en service dans les temps.