Jusqu’à quand l’État mènera-t-il une politique injuste en Seine-Saint-Denis ?

Mercredi, Mars 27, 2024

Le 27 mars 2024 - Bagnolet, Bobigny, Bondy, Le Pré Saint-Gervais, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-Sec, Pantin, et Romainville : Est Ensemble, ses 430 000 habitants et leurs associations et entreprises font chaque jour notre fierté en faisant preuve d’un dynamisme remarquable. Cette énergie, nous l’accompagnons, maires des communes d’Est Ensemble, en mettant tout en œuvre pour répondre aux besoins de nos concitoyens. Mais alors que nous travaillons depuis des années en situation de sous-financement pérenne de l’Etat, l’annonce récente d’une augmentation du nombre de Quartiers Prioritaires de la Ville sans aucune révision du budget repose comme chaque année une question essentielle : où est ce fameux “pognon de dingue” dont nous n’avons toujours pas vu la couleur ? Que fait l’État censé être “plus fort” depuis 2019 ?

Pour mettre en lumière ces inégalités criantes, que l’Etat n’a pas su combler depuis les annonces du Président et de l’ancien Premier Ministre, nous avons décidé de créer l’Observatoire du Territoire. Celui-ci a déjà produit un premier rapport aux conclusions sans appel : Est Ensemble en particulier, et la Seine-Saint-Denis en général, subissent les conséquences d’une politique injuste de la part de l’État, particulièrement dans les domaines cruciaux que constituent l’éducation et l’enfance. Dans la droite lignée du Rapport parlementaire conduit par Christine Decodts et Stéphane Peu, il appelle à une réponse immédiate de l’État.

Des injustices tout au long du parcours des citoyens

Parmi les chiffres mis en avant par notre rapport, ceux relatifs à l’éducation illustrent une réalité alarmante : les élèves du département sont privés d’un mois de cours chaque année, en raison d’un taux de non-remplacement des enseignants absents de 15%, nettement supérieur à la moyenne nationale. Cette situation est aggravée par la prévalence élevée d’enseignants contractuels et d’enseignants de moins de 35 ans. Le turn-over y est le plus élevé d’Île-de-France, exacerbant les difficultés dans un département où près de la moitié des élèves sont scolarisés en REP/REP+.

L’injustice vécue dès les bancs de l’école se poursuit quand on la quitte : les agences Pôle Emploi (aujourd’hui France Travail) du territoire sont confrontées à une surcharge de 250 demandeurs d’emploi suivis par conseiller, bien au-delà du maximum théorique de 150, et ce alors que le taux de chômage atteint 17%. Un parcours d’accès à l’emploi rendu d’autant plus difficile qu’il faut attendre 5 mois pour voir sa demande d’Aide au Logement traitée, contre quelques semaines à l’échelle du pays.

Cette crise s’étend également au domaine de la santé, où l’hôpital Avicenne de Bobigny symbolise la saturation des services d’urgence, avec un temps d’attente moyen de 250 minutes pour un passage aux urgences l’année passée. Ce chiffre, significativement plus élevé que dans d’autres établissements de la région (122 minutes en moyenne à l’hôpital Bichat de Paris 18ème), témoigne des difficultés auxquelles est confronté le système de santé publique face à une population particulièrement fragile.

Enfin, si la Seine-Saint-Denis est régulièrement pointée du doigt pour son taux de délinquance, il est bon de rappeler ses sous-effectifs majeurs en termes de sécurité et de justice, et ce, malgré le doublement des agents de police judiciaire. On compte seulement 34 policiers pour 10 000 habitants contre 44 dans les Hauts-de-Seine, et pas plus de 58 magistrats du parquet, soit plus de trois fois moins que la recommandation du Conseil de L’Europe.

Comment ne pas comprendre que nombre de nos concitoyens ont l’impression que la République les a quittés ? Jusqu’à quand l’Etat va-t-il s’enliser dans l’inaction sur notre territoire ?

Une exigence : l’égalité

Les habitants de notre territoire veulent avant tout vivre de manière digne. L’absence de services publics vitaux est une discrimination qui ne dit pas son nom qui agit comme un poison lent et sournois dans le quotidien des populations de Est Ensemble.

Notre appel transcende les clivages politiques pour se concentrer sur l’essentiel : la nécessité d’une action étatique forte pour rétablir l’égalité et la justice sociale. Nous ne sollicitons pas la charité, mais demandons simplement d’offrir à nos concitoyens, et surtout à nos jeunes, les mêmes chances de réussite qu’ailleurs en France.

Cette exigence d’égalité ne devrait pas être exceptionnelle, mais devient une urgence alors que les promesses non tenues par le Président contribuent à l’épuisement du projet d’émancipation sociale qu’est la République. L’État doit reconnaître sa part de responsabilité, agir concrètement pour redonner leur dignité aux habitants de la Seine-Saint-Denis, et montrer, plus seulement par les mots, mais par les actes, que la République est une et indivisible, pour tous ses enfants.

Signataires : Patrice BESSAC Maire de Montreuil et Président d’Est Ensemble, Tony DI MARTINO, Maire de Bagnolet, Abdel SADI, Maire de Bobigny, Laurent BARON, maire du Pré-Saint-Gervais, Lionel BENHAROUS, Maire des Lilas, Olivier SARRABEYROUSE, Maire de Noisy-le-Sec, Bertrand KERN, Maire de Pantin, François DECHY, Maire de Romainville.